La différence entre le droit au bail et le fonds de commerce

Lorsque l’on se lance dans la création ou la reprise d’un commerce, deux mots reviennent sans cesse dans les échanges avec les comptables, les notaires ou les banquiers : fonds de commerce et droit au bail.

À première vue, ils paraissent proches puisqu’ils font tous deux référencent aux locaux, à l’activité, bref, au business. Si bien que beaucoup d’entrepreneurs finissent par les confondre.

Pourtant, derrière ces mots se cachent des réalités juridiques et économiques très différentes, avec des conséquences concrètes sur la valeur d’un dossier, le risque juridique et la stratégie d’installation.

C’est pourquoi j’ai voulu clarifier la différence entre ces deux notions, et ce sans jargon inutile !

Droit au bail et fonds de commerce : l’origine de la confusion

Mais pourquoi tant d’entrepreneurs mélangent droit au bail et fonds de commerce ? La confusion n’est pas qu’une question de vocabulaire. Elle naît de la manière dont ces deux notions se rencontrent dans la vie réelle d’un entrepreneur.

En effet, dans le langage courant, le terme « bail » évoque un contrat de location alors que le fonds suggère quelque chose de matériel, presque comme un bien immobilier. Or, le droit donne à ces termes une portée plus large et plus abstraite.

Le droit au bail ne correspond pas aux « murs », il fait uniquement référence au droit d’occuper un local à certaines conditions.

A contrario, le fonds de commerce n’est pas un bien physique, mais un ensemble d’éléments juridiques et économiques organisés autour d’une activité.

Pour un entrepreneur non-juriste, il est donc très facile de mélanger les deux puisqu’ils semblent désigner la même réalité : un commerce avec son local, son activité et ses clients.

Si dans l’esprit d’un entrepreneur, ces deux dimensions sont indissociables, ce n’est pas le cas sur le plan juridique : le local relève du bail, l’activité relève du fonds de commerce. La séparation est donc invisible pour celui qui travaille au quotidien, mais fondamentale pour celui qui rédige un contrat.

Le droit au bail : un outil pour occuper et sécuriser un lieu

Le droit au bail correspond au droit d’occuper un local commercial selon les conditions prévues dans un contrat de location. Il ne confère aucune propriété sur le lieu lui-même, le propriétaire des murs reste le bailleur, tandis que l’entrepreneur est simplement le locataire.

Ce droit est encadré par la loi, notamment par le Code de commerce pour les baux commerciaux, qui protège le locataire contre certains abus et garantit des conditions minimales de renouvellement et de loyer.

C’est pourquoi le droit au bail est aussi un gage de sécurité pour l’entrepreneur :

  • sécuriser la durée : la loi prévoit en général un bail commercial de 9 ans, renouvelable ;
  • protéger contre les hausses de loyers arbitraires : l’augmentation des loyers est plafonnée (indice IRL) et le locataire peut contester certaines augmentations.

Un droit au bail bien négocié peut représenter un avantage stratégique, surtout dans des zones commerciales attractives où les locaux sont rares. En effet, le droit au bail a aussi une valeur monétaire importante distincte de celle du fonds de commerce.

Autrement dit, il est possible de céder son droit au bail. Cela signifie que le locataire cédant transfère à une autre personne (le cessionnaire) le bénéfice de son bail à titre onéreux par le biais d’une indemnité négociée entre les parties. On parle aussi de pas de porte.

Ainsi, le prix d’un bail dans les centres-villes ou zones prisées peut être bien plus élevé. Ajoutons à cela que la différence entre le montant du loyer initialement fixé et le prix du marché locatif actuel pour un local commercial similaire est aussi un élément impactant le prix de cession du droit au bail.

Si vous souhaitez plus d’information, je vous invite à lire un article que j’ai écrit sur le sujet : Cession du droit au bail : définition, fonctionnement et formalités.

Le fonds de commerce : un patrimoine immatériel centré sur l’activité

Si le droit au bail concerne le lieu, le fonds de commerce, lui, concerne l’activité qui s’y déroule. Il représente l’ensemble des éléments corporels et incorporels permettant à un entrepreneur de générer du chiffre d’affaires :

  • clientèle et achalandage ;
  • nom commercial et enseigne ;
  • matériel et outillage (machines, équipements, mobilier, etc.) ;
  • licences et autorisations (permis d’exploitation, droit de terrasse, licences de boissons, etc.) ;

Il faut donc bien comprendre que le fonds de commerce ne comprend pas les murs du local, ni forcément le droit au bail, même si ce dernier peut en faire partie en cas de cession du fonds de commerce, car il est indispensable à l’exploitation. Et c’est là que se crée la confusion.

Comme je vous l’expliquais, il est possible de céder uniquement son droit au bail. Mais il est aussi possible de céder son fonds de commerce, c’est-à-dire tout ce qui est indispensable à l’activité. Dans une telle situation, le droit au bail fait partie des éléments indispensables. Aussi, le droit au bail est par défaut inclus dans le fonds de commerce en cas de cession de ce dernier.

Un exemple vous aidera à y voir plus clair. Imaginons un boulanger qui souhaite reprendre un local déjà exploité par un confrère. Il peut soit :

  1. Acheter seulement le droit au bail, c’est-à-dire le droit d’occuper le local selon le contrat existant. Dans ce cas, il n’hérite ni de la clientèle ni du nom commercial. Il devra reconstruire son activité à partir de zéro.
  2. Acheter le fonds de commerce complet, incluant le bail, la clientèle et l’enseigne. Dans ce cas, le droit au bail est un élément du fonds de commerce, mais ce n’est pas l’ensemble du patrimoine.

 

Le droit de bail et le fonds de commerce sont deux notions complémentaires, mais distinctes, et comprendre leur différence est essentiel pour tout entrepreneur, repreneur ou investisseur. Dans la pratique, ces deux notions peuvent se croiser : le bail peut être inclus dans la cession d’un fonds de commerce, mais il peut aussi exister séparément. La distinction a des conséquences directes sur la valorisation, la négociation et la stratégie d’installation.


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